Le Mémorandum de 52 pages Une profession de foi démocratique

« L’UDPS n’est pas un parti de Baluba. D’ailleurs, l’acte constitutif de ce parti a été élaboré chez moi. À ce que je sache, mon domicile n’est pas celui d’un Muluba » Vincent Mbwankiem Niaroliem, Cofondateur de l’UDPS

Pour les trois principaux rédacteurs de ce Mémorandum (Étienne Tshisekedi, Anaclet Makanda et Joseph Ngalula) envoyé au dictateur Mobutu Sese Sese du Zaïre, le Congolais devenu adulte, donc pleinement citoyen d’un pays libre et digne d’un État souverain et indépendant doit être caractérisé par la libération mentale. C’est ici que l’on retrouve la véritable empreinte de Makanda Mpinga Shambuyi. Ce citoyen doit aussi être caractérisé par son degré d’instruction politique. C’est à ce niveau que l’on sent la contribution de Ngalula. Et, enfin, pour qu’il soit pleinement une personne humaine, c’est-à-dire un sujet jouissant de l’intégrité de son être, ce citoyen libéré mentalement et instruit politiquement doit disposer effectivement des droits et libertés. C’est à ce niveau que l’apport de Tshisekedi est pertinent.

Pour le psychologue Anaclet Makanda, face à la dictature qui avilit l’être humain, qui le chosifie davantage et le réduit à sa plus simple expression, le Congolais acquiert définitivement le statut de citoyen par la libération mentale et psychologique. C’est par cette forme de libération qu’il se découvre totalement. C’est par ce truchement qu’il prend conscience de son être, c’est-à-dire de ses capacités humaines et surtout de sa place dans la société. Ainsi, pour se découvrir, celui-ci doit braver la peur. Pour ce faire, la stratégie de libération mentale adoptée pour fortifier le citoyen consiste à lui apprendre à démystifier, à démythifier le Léopard Mobutu [1]. Il faut se rappeler que sous l’empire du parti unique (inique) ou Parti-État, le dictateur Mobutu est entouré de divers mythes lui procurant une personnalité divine et hors du commun. Il est un dieu vivant (Mobutu Nzambe, Mobutu Yezu) [2], un Esprit (Vénérable Maître inspirateur de la Secte politique Prima Curia), un astre (Mobutu Moyi) [3], un aiguillon pour la société (Guide suprême, Guide éclairé ou clairvoyant, le grand timonier), un aigle intouchable voire même inaccessible. Par conséquent, la grande contribution de L’Honorable Makanda dans la lutte politique au Congo est d’avoir réduit Mobutu à sa plus simple expression, de l’avoir ramené à son piédestal humain. À cet effet, rappelez-vous Tshisekedi lorsqu’il traite Mobutu de dictateur ou de monstre humain…

Pour Joseph Ngalula, le Congolais est citoyen à part entière de son État lorsqu’il bénéficie réellement d’un bagage politique, d’une formation idéologique qui le prédispose normalement à cet effet. Pour cet ancien ministre de l’Éducation nationale, cette formation doit inéluctablement passer par un stade d’apprentissage à la démocratie. Pour cette personnalité, le multipartisme est la première étape d’encadrement du citoyen pour qu’il puisse cerner et maîtriser ce qu’est le phénomène politique. C’est le pluralisme qui le fortifie et l’édifie davantage. En tant qu’école et cadre de formation, il l’éclaire dans ses choix et fait de lui un acteur décisif dans l’espace démocratique. C’est pour cette raison majeure qu’au sein même de l’UDPS, l’aspect pédagogie et instruction des militants, c’est-à-dire l’éducation des masses, est éminemment important. À ce niveau, ce n’est pas pour rien que Dr Étienne Tshisekedi insiste beaucoup sur le degré de maturité politique de l’élite dirigeante et sur la culture des textes qui doit prévaloir dans la communauté politique.

Pour Dr Étienne Tshisekedi, l’on est politiquement citoyen d’un pays lorsque l’on dispose juridiquement des droits et des obligations, des libertés et des devoirs reconnus normalement par la loi fondamentale. Pour être effectif, ce catalogue doit circonscrire l’action de la puissance publique dans son exercice à l’égard du citoyen. Sinon, l’on tombe malheureusement sous l’empire de l’arbitraire dont la réalité est l’écrasement du plus faible. En d’autres termes, pour ce juriste, la loi doit servir à protéger la société contre toutes dérives autoritaristes et pathologiques du pouvoir d’État. Pour lui, le droit est d’abord et avant tout source de sécurité et de stabilité de la société. C’est ce qui fait que Tshisekedi insiste toujours sur le respect de la loi sans lequel l’illégalisme ou la permissivité liberticide transforme l’environnement social en une jungle. Par conséquent, il importe de se rappeler sa déclaration, au demeurant édifiante, sur les nombreuses violations de l’Accord global et inclusif, ainsi que le piétinement de la constitution de Transition par le mercenaire-chef de la faction belligérante de Kinshasa, Joseph Hyppolite Kanambe Kazembere : ‘‘Tous ceux qui ont violé les dispositions de ces textes majeurs et fondamentaux sont des hors-la-loi’’.

S’il fait du Congolais un citoyen et du peuple le seul souverain primaire décidant de son avenir politique et de ses dirigeants, la Lettre ouverte du 1er novembre 1980 adressée au dictateur Mobutu Sese Seko invente une nouvelle Nation fondée sur le concept de citoyenneté. En cela, ce fameux Mémorandum de 52 pages constitue, bien qu’il le complète substantiellement, une rupture épistémologique avec le lumumbisme historique (le Mouvement national congolais) [4]. En effet, pour le père de l’indépendance nationale Patrice Emery Lumumba, la Nation congolaise est une entité transethnique dans laquelle les ethnies, en tant que groupements sociaux et humains à opposer systématiquement les uns contre les autres, n’existent plus. À ce titre, les Congolais forment une seule ethnie [5], c’est-à-dire une seule Nation composée matériellement d’individus libérés du système colonial et du régime oppresseur belge. À ce niveau, le Premier ministre nationaliste et panafricaniste Lumumba sans doute influencé par sa lecture du philosophe genevois Jean-Jacques Rousseau met en lumière l’aspect égalitaire et fraternel qui doit prévaloir dans la nouvelle société étatique. Sa définition de la Nation est principalement conditionnée par une histoire commune faite des drames de privation de dignité et de liberté sous l’empire colonial.

Pour les rédacteurs du Mémorandum de 52 pages, particulièrement Étienne Tshisekedi probablement marqué par sa connaissance de Charles de Secondat (baron de La Brède et de Montesquieu) et Charles Alexis Clérel de Tocqueville, la Nation vitrifiée par une dictature féroce et macabre comme celle de Mobutu Sese Seko du Zaïre doit, pour exister moralement et idéologiquement, être physiquement composée de citoyens. C’est-à-dire des personnes libres dont les droits et libertés enchâssés dans la loi fondamentale s’imposent à l’État et à ses serviteurs patentés. Selon leur entendement, c’est la liberté qui détermine la qualité de citoyen et son appartenance à la communauté nationale. S’ils se démarquent de Patrice Emery Lumumba au niveau du dépassement ethnique [6], ces derniers le rejoignent profondément au niveau du concept de libération, de la notion de liberté face à un système répressif, à un régime oppresseur des droits fondamentaux [7], formant ainsi le fameux triptyque républicain ‘‘Liberté, Égalité et Fraternité’’ cher aux patriotes et révolutionnaires américains et français.

C’est effectivement au nom de ces principes de liberté et de citoyenneté, d’égalité et de fraternité que Dr Étienne Tshisekedi rend solennellement hommage au Combattant de la liberté, de la justice et de la démocratie José Mukenge exécuté sommairement par les forces répressives de Kinshasa. C’est également au nom de ces valeurs fondamentales promues par l’UDPS dans l’espace national qu’il daigne recevoir les représentants de la coalition d’étudiants exclus d’institutions universitaires par les autorités kanambistes pour avoir réclamé l’équité en matière des droits de scolarité. Par ses gestes éminemment politiques et hautement symboliques, cet homme d’État manifeste le patriotisme constitutionnel. Par ses actes qui ne sont point passés inaperçus, celui-ci met en évidence son profond attachement à la liberté, à la citoyenneté et à la loi en tant que socle de la société et ferment de la collectivité nationale.

Ainsi, le président national de l’UDPS, Étienne Tshisekedi, fraîchement retourné au pays après un séjour sud-africain de deux ans et demi, inaugure cette Transition si décriée sous le signe de la démocratie, c’est-à-dire le respect dû au citoyen, donc à la liberté garantie par la Loi fondamentale adoptée par les acteurs de la Transition, sans exception. Étant donné que l’UDPS est un parti avant-gardiste, celui de la conscience démocratique, de l’amour patriotique et surtout de la morale républicaine, cet homme d’État entend veiller au grain, tel un gardien du temple afin que triomphent à jamais, dans cette phase capitale, cruciale de l’avenir politique du Congo, les idéaux sacro-saints de liberté, de justice, de dignité, de paix, de fraternité, de solidarité et d’égalité sensiblement au cœur de la citoyenneté, c’est-à-dire l’appartenance à la Nation. C’est cette conviction qui justifie fondamentalement son come-back sur la scène nationale. Par conséquent, ceci présage certainement dans le futur bien des choses, bien des événements, dans la mesure où la fameuse Lettre ouverte du 1er novembre 1980 reste encore et toujours d’actualité…

Quelques passages choisis de la Lettre ouverte du 1er novembre 1980 au dictateur Mobutu Sese Seko du Zaïre devant servir de méditation au peuple congolais :

« Votre détermination est de confisquer le pouvoir à jamais » page 14

« En fait, vous avouiez que ces voleurs opéraient avec votre bénédiction tacite puisqu’ils restent impunis » page 17

« Vous disposez seul du pouvoir de nommer, révoquer, promouvoir les membres de la classe dirigeante zaïroise et de ce fait, vous devez logiquement endosser les actes de vos protégés que vous avez reconnu être les pilleurs et exploiteurs de notre peuple » page 18

« La rareté des marchandises ou des biens de consommation est des plus impressionnante dans beaucoup si pas dans tous les ménages de Kinshasa, hormis le vôtre et ceux de vos courtisans. La situation est pire encore à l’intérieur du pays où des opérations monétaires irréfléchies et intempestives ont mis les populations dans un état de dénuement incomparable… » page 26

« Le chaos économique est total au Zaïre parce que malgré votre promesse de ne jamais dévaluer la monnaie nationale, vous avez pris l’agréable plaisir de dévaluer, dévaluer jusqu’à ruiner nos populations dont vous avez de nouveau confisqué le pouvoir d’achat par la démonétisation.

« Cette dernière a été décidée unilatéralement et d’autorité par vous et seulement par vous. Le chaos est total parce que vous aviez promis au peuple de démissionner si jamais le Zaïre monnaie n’était plus convertible sur le marché de change international. Et, vous ne l’avez jamais fait, et semble-t-il, vous n’avez pas envie de le faire » page 26

Cet Éditorial est particulièrement dédié aux fameux Treize Parlementaires ‘‘frondeurs’’ du MPR, signataires du célèbre Mémorandum de 52 pages, et pères fondateurs de l’UDPS pour l’éminence de leur combat ainsi qu’à tous les martyrs de la démocratie tombés sur le champ d’honneur pour avoir bravé avec courage et surtout conviction ce diable qu’est réellement la dictature néocolonialiste ou néo-impérialiste incarnée par la triade Mobutu Sese Seko,  Mzee Kabila et Kanambe.

Cette dédicace se veut naturellement la reconnaissance de leurs grandes contributions et sacrifices, à titre de compassion et de générosité, à l’épanouissement de l’être humain. Elle se veut pertinemment un hommage solennel rendu à leur foi aux valeurs humanistes et leur attachement aux principes universels, ainsi que leur participation aux efforts d’élévation de la conscience nationale.

Ainsi, à l’occasion du 23e anniversaire de la Lettre ouverte du 1er novembre 1980 adressée au dictateur Mobutu Sese Seko, il appartient à la Nation tout entière et aux acteurs de l’actuelle période de Transition sans doute plus préoccupés par leurs émoluments que par le sort précaire et lamentable de leurs concitoyens, de les honorer, y compris les personnes décédées à titre posthume, pour avoir effectivement indiqué la voie de la démocratie et montré à tous l’exemple de courage politique. Aussi appartient-il aux entreprises médiatiques d’en faire une large diffusion et des commentaires appropriés.

Aux Autorités et Responsables politiques, aux nombreux Combattantes et Combattants de l’UDPS, d’organiser en cette journée d’anniversaire (1er novembre 2003), et à de différents échelons structurels (Représentations, Fédérations, Sections et Cellules), des séminaires de réflexion sur les thèmes suivants  : ‘‘L’UDPS et le messianisme démocratique’’, ‘‘Le rôle du Combattant de l’UDPS dans l’action politique’’, ‘‘La mission des partis politiques dans la collectivité publique’’, ‘‘Transition et illégalisme : Le retour de Mobutu et de son ombre’’, ‘‘Les animateurs de la Transition ou la réconciliation des forces antidémocratiques’’, ‘‘Faut-il renverser les institutions de la Transition ?’’, ‘‘Un processus électoral libre, transparent et multipartite est-il vraiment possible au Congo ?’’, ‘‘La MONUC : Un régime proconsulaire au Congo ?’’, ‘‘La Démocratie : achèvement du processus d’indépendance du Congo et de libération de l’Afrique’’, ‘‘Faut-il maintenir des « relations privilégiées » avec la Belgique ?’’ et enfin ‘‘Mondialisation ou Globalisation des marchés nationaux : L’État congolais face aux exigences et impératifs du néolibéralisme’’.

Pour ce faire, il importe de s’appuyer sur les documents ci-après : ‘‘Histoire des Vaillants Fils de la Saint-Sylvestre, Vade-Mecum du Combattant de l’UDPS’’, Léon-Tousseul Kalengayi Kadima-Muntuntu; ‘‘Urgence au Congo, Sept raisons pour restaurer l’ordre démocratique’’; ‘‘UDPS, De ses origines à 1993’’, Paul Gabriel Kapita Shabangi, Séminaires de formation idéologique, Luasa, Kinshasa, 1995; ‘‘Déclaration de politique générale de l’UDPS’’, Étienne Tshisekedi, DIC, Sun City, RSA, le 8 mars 2002; ‘‘Lettre ouverte du 1er novembre 1980 au Président-Fondateur du MPR Mobutu Sese Seko’’, Les Représentants du peuple (les Treize Parlementaires); ‘‘Les options économiques et financières de l’UDPS’’, projet de société du parti; ‘‘L’UDPS, le RCD et le Rwanda, Entretien exclusif du Président national de l’UDPS Étienne Tshisekedi avec le quotidien Le Potentiel’’, 3 mai 2002; ‘‘Louis Michel, un néocolonialiste et le principal obstacle actuel à  la solution appropriée à la crise congolaise’’,  communiqué de presse, Dr François Mpuila Tshipampa Tshidibi, Représentant de l’UDPS/BELUX, Bruxelles, 20 décembre 2001.

Un Acte de conscientisation nationale

« L’affaire [l’État zaïrois] nous appartient. Nous n’avons de comptes à rendre à personne » Litho Moboti[8]

Si le Mémorandum de 52 pages a réhabilité la représentation nationale, sa plus grande contribution dans l’espace politique national est d’avoir conféré au peuple la qualité de citoyen et de souverain primaire. En effet, sous la traite négrière, le Congolais a le simple statut de bête de somme, de chose. Considéré comme un être sans âme, cette personne humaine est vendue comme un objet, une marchandise ou un bien. À ce titre, elle est exploitée sans merci. Sous la colonisation belge, celle-ci devient un forçat astreint à remplir des corvées (la campagne de l’ivoire et du caoutchouc, la construction des chemins de fer sous le régime servile de Bula Matari). Sous le système mobutiste renégat, elle n’est pas un sujet d’État, comme le rêve le père de l’indépendance, Patrice Emery Lumumba. Le Congolais est, à dire vrai, un travailleur réduit à sa plus simple expression. Ce dernier n’a même pas droit au salaire en tant que fruit de son labeur, d’ailleurs pénible. Le pouvoir mobutien le détourne, plutôt le confisque pour ses frasques et frivolités, de multiples manières. Par le non-versement du revenu appartenant à l’employé et par le biais de l’inflation qui est, par définition, une neutralisation du pouvoir d’achat.

Sous les Kabila et Kanambe où le pillage des richesses étatiques et ressources nationales est monnaie courante[9], c’est le même régime de privation qui continue. Le non-versement des traitements dû à des fonctionnaires de l’État bat effectivement son plein. Comme en témoignent d’ailleurs de nombreux arriérés et arrérages dus aux parlementaires des CPP et PPRD. Toutefois, sous le régime kanambiste visiblement appuyé par l’establishment international, entre autres Paris et Bruxelles, l’objectif primordial est, dans le cadre de mondialisation néolibérale des marchés nationaux, de réduire systématiquement le Congolais en un simple consommateur des produits industriels étrangers sans perspective réelle de développement de ses potentialités nationales.

Contrairement à ces vues étroites véhiculées par la dictature et au statut d’être soumis et inconscient de ses énormes possibilités, la Lettre ouverte du 1er novembre 1980 octroie au Congolais le statut de citoyen, c’est-à-dire une personne disposant réellement des droits et des libertés dans la société afin de s’épanouir comme tout être humain. Il fait de lui un acteur social apte à transformer son environnement. En cela, le Mémorandum de 52 pages lui restitue son humanité confisquée par la dictature qui perpétue indéfiniment son statut colonial de chose ou esclavagiste d’individu sans âme, donc sans esprit, et par conséquent sans intelligence pour entreprendre quoi que ce soit [10].

En d’autres termes, ce document fait directement passer le Congolais au stade adulte, de personne mature susceptible de se prendre en charge, sans l’aide ou l’administration d’un tuteur. Par conséquent, la Lettre ouverte au dictateur Mobutu met en relief la notion d’indépendance d’esprit qui doit matériellement se traduire par l’indépendance effective de l’État et la souveraineté de la Nation vis-à-vis de ses dirigeants fantoches et partenaires étrangers. Pour les Treize Parlementaires du MPR, les Congolais ne sont plus de petits enfants (les petits nègres de la colonie) à qui on donne une sucette (Rappelez-vous ce geste du Roi Baudouin 1er lors de sa première visite au Congo en 1955). Ils sont capables de se diriger, aptes à s’auto-administrer, c’est-à-dire à choisir ce qui est bon, utile et nécessaire à leur essor (développement). C’est cette perspective qui fait peur aux diverses puissances coloniales (la Belgique et la France) qui, dictées par le racisme primaire et les impératifs économiques des marchés d’écoulement et d’exploitation, préfèrent résolument le statu quo dictatorial.

« Étienne Tshisekedi [L’UDPS] ne combattait pas un homme, mais un système » Pr. Félix Vundwawe te Pemako, Président du MPR

Si elle ouvre largement des perspectives d’une société démocratique et d’un État de droit républicain, cette démocratie rêvée par les rédacteurs et signataires de la Lettre ouverte du 1er novembre 1980 n’est pas que politique. Elle se veut aussi économique, sociale et culturelle. Cette démocratie est d’abord politique dans la mesure où les Treize Parlementaires considèrent la collectivité étatique comme un moteur essentiel de la société. Pour eux, l’État est le cœur de l’activité nationale où se prennent des décisions qui engagent le destin de la communauté. Ce faisant, en tant que centre de décision et d’impulsion, celui-ci doit incarner la volonté des citoyens, leurs aspirations légitimes. Ainsi, les animateurs de l’État chargés de protéger les intérêts de la collectivité publique doivent, à cet effet, normalement recevoir l’onction populaire, et ce sous forme de suffrage électoral. Pour ceux-ci, la légitimité dont bénéficient politiquement les acteurs nationaux, s’acquiert à travers des élections libres, multipartites et transparentes. Ceci explique la raison pour laquelle l’UDPS insiste toujours sur la pertinence des élections afin de conférer la légitimité au titulaire du pouvoir.

Force est de constater que depuis la véritable ‘‘élection présidentielle’’ vécue en direct par le monde entier et le peuple congolais lors du retour au pays du leader national de l’UDPS, ‘‘consacrant ainsi la véritable légitimité politique’’, ‘‘sacrant ainsi le vrai chef de l’État’’, le camp de la haine et de la trahison ne voit plus la nécessité de l’organiser au terme de l’actuelle période de Transition [11]. C’est-à-dire dans les deux ans et demi. Venant parfaitement corroborer les soupçons pesant sur la neutralisation des institutions citoyennes chargées de superviser les opérations électorales, cette annonce d’ailleurs moins surprenante a été faite par son mentor patenté, le Vice-Premier ministre belge chargé des Affaires étrangères Louis Michel. Ce qui témoigne, à n’en pas douter, de sa vision colonialiste ainsi que son traitement à l’égard des Congolais qui, pour lui, demeurent à tout jamais un peuple puéril, docile devant à ce seul titre se conformer aux vues étroites de l’ancienne puissance coloniale, la Belgique.

Cette déclaration atteste, par-dessus le marché, les craintes à maintes reprises exprimées par la véritable opposition démocratique et les forces nationalistes [12]. En effet, cette personnalité politique et diplomatique étrangère [étrange] est totalement perçue, dans le chaos, l’anarchie et l’imbroglio actuellement en vigueur à Kinshasa, comme le dirigeant occulte du pays. Cette dernière est chargée de prendre à l’emporte-pièce des décisions allant à l’encontre même du processus de Dialogue inter congolais (DIC) [13], de l’Accord global et inclusif (AGI) [14] pourtant ouvertement appuyés par celle-ci et son propre gouvernement.

Cette réaction doublement affligeante et provocante de l’officiel belge prouve à suffisance que les équipiers du fameux camp de la haine et de la trahison farouchement opposé à la démocratie, donc à la souveraineté populaire et à l’indépendance nationale, ont réellement perdu tout sommeil. Littéralement désarçonnée par l’accueil triomphal réservé à son leader chéri par le vaillant peuple congolais, cette ligue de putschistes a effectivement perdu tout contrôle de l’agenda politique même frappé du sceau de la tricherie et des actes de sabotage, notamment à la vue des calicots, bannières et pancartes brandis par la marée humaine, sur lesquels on pouvait lire tout le long du parcours emprunté par Dr Étienne Tshisekedi : ‘‘Tshisekedi le vrai président de la République, Tshisekedi le vrai chef de l’État’’ou ‘‘Ye ayiba te, Ye aboma te’’. Ce qui veut dire ‘‘Lui (Tshisekedi) n’a jamais pillé le pays, lui (Tshisekedi) n’a jamais répandu le sang humain [15]’’. Tous ces slogans non moins symboliques et surtout révélateurs de l’ambiance politique et de l’état d’esprit des Congolais démontrent suffisamment leur appréciation saine et leur regard serein portés spécifiquement sur les principaux animateurs de la Transition politique, à plus forte raison pupilles du Belge Louis Michel. En d’autres termes, Bruxelles soutient, y compris Paris, contre la volonté suprême du peuple [le vrai souverain primaire], un gouvernement de criminels de guerre à Kinshasa, lesquels sont passibles de la justice pénale internationale, sous le couvert du vocable politiquement correct ‘‘gouvernement d’union nationale’’.

Toutefois, dans le cadre de l’actuelle période de Transition où la magistrature suprême est incarnée par un sujet étranger imposé et soutenu par des intérêts politiques extérieurs (Paris et Bruxelles), en l’occurrence le général-major Joseph Hyppolite Kanambe Kazembere M’Twale Christopher, peut-on vraiment concevoir ce type d’opérations ou scrutins, même si démocratie oblige, avec la participation de ce dernier ? Force est d’admettre que, même dans des pays à forte tradition démocratique, cela n’est aucunement concevable et réalisable. Alors, pourquoi le serait-il tout autant au Congo ? Par conséquent, s’il doit y avoir des élections pour désigner le personnel politique devant assumer le destin national, ces scrutins doivent impérativement se dérouler sans la participation de Kanambe Kazembere parce qu’il est visiblement un étranger et non un enfant du pays ! Sans compter que celui-ci est un criminel de guerre passible de la justice internationale. À ce propos, tous les chefs de guerre congolais dont les mains sont maculées de sang humain, doivent être frappés d’inéligibilité. Doivent être irrémédiablement exclues du processus électoral toutes factions armées et organisations politiques ayant participé directement ou indirectement aux massacres des populations. Bref, au regard de l’impunité, toute personne morale ou physique ayant matériellement ou moralement contribué, incité, poussé, par ses actes voire propos à caractère haineux à diviser ou à endeuiller la Nation, doit être définitivement écartée.

Doivent être également écartés des opérations électorales tous les Congolais ayant participé de loin ou de près aux actes de sabotage de l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka ainsi que des résolutions du DIC (Pacte républicain de Gaborone, Accord global et inclusif, Constitution de la Transition). Cette mesure doit être étendue à tous ressortissants des pays étrangers ayant cautionné, soutenu ou appuyé de quelque façon que ce soit lesdits actes. Sur ces questions fondamentales, le peuple congolais qui est définitivement le seul et unique souverain primaire du pays, doit demeurer résolument ferme, vigilant et alerte. À cet égard, point de compromis ! Donc point de transaction !

Par extension, il y a lieu d’exclure du processus constitutionnel les experts étrangers censés apporter leur assistance aux Congolais afin de bâtir un édifice normatif digne de ce nom. À ce niveau, la RDC n’a pas, à dire vrai, besoin de leur aide. Le pays regorge énormément d’éminents juristes voire constitutionnalistes dont la réputation n’est plus à tailler, dont le professionnalisme est reconnu. D’ailleurs, la CNS a abattu un excellent travail avec feu Marcel Lihau Ebua. Il y a effectivement là une matière brute à avaliser. Il y a déjà là un acquis considérable à faire revivre… Alors, pourquoi aller chercher ailleurs dès lors que tout est là. Le Congolais doit immédiatement cesser avec ces mentalités esclavagistes ringardes de colonisé qui, pour tout entreprendre, a nécessairement besoin d’un tuteur, d’un administrateur à plus forte raison occidental.

Il sied également d’exclure ces ONG d’Outre-Atlantique ou d’Outre-Méditerranée chargées d’élaborer la loi électorale en lieu et place des experts nationaux qui disposent à cet effet, sur le terrain, d’une meilleure connaissance et d’une parfaite maîtrise de la réalité politique et sociologique. D’autant plus que celles-ci sont, en vérité, chargées de garantir les intérêts géopolitiques de leurs vrais maîtres, les gouvernants et bailleurs de fonds. D’ailleurs, s’il y a lieu d’exiger une quelconque assistance à ce niveau, l’on ferait mieux de se tourner vers des pays africains, tels la République Sud-Africaine, la Namibie, le Bénin, le Sénégal, le Mali voire le Nigeria qui disposent déjà d’une longueur d’avance dans ce domaine. Au lieu de s’en remettre tout bonnement comme de petits enfants et nègres dociles à des Occidentaux. 

C’est ‘‘cet esprit d’être infantilisé, puéril et docile, inconscient, imbécile et sans personnalité’’ que combat réellement la Lettre ouverte des Treize Parlementaires au dictateur Mobutu Sese Seko. Faudrait-il avoir la mémoire courte pour savoir que, à chaque fois que les Occidentaux se mêlent de questions congolaises, il s’ensuit de tout temps le désordre, le chaos et l’anarchie. Pour preuve, l’imbroglio dont est comptable le CIAT sur la désignation du vice-président réservé à l’opposition politique. D’autant plus que l’objectif visé était réellement la balkanisation du Congo à partir du Grand Kasaï avec l’exclusion de Dr Étienne Tshisekedi, sur fond des massacres interethniques selon le modèle d’épuration expérimentée en Bosnie-Herzégovine. Mais en vain ! Heureusement pour le grand Congo qui tient à l’unité nationale et à l’intégrité territoriale !

À cet égard, rappelez-vous juste un petit instant les dégâts politiques occasionnés par la Loi fondamentale du 19 mai 1960 confectionnée par des experts constitutionnalistes belges sur les balbutiements du jeune État congolais (la crise politique entre le président Joseph Kasa-Vubu et le Premier ministre Patrice Emery Lumumba). De toute manière, qui va rétribuer tous ces fameux experts ? Est-ce le contribuable congolais paupérisé par la triple mafia mobutiste, kabiliste et kanambiste ? Est-ce la communauté internationale comptable du pillage des ressources nationales au Congo ? Des réponses et des éclaircissements doivent être apportés à ce niveau au peuple…

Cette démocratie promue par la Lettre ouverte est également économique. Au moment de l’accouchement de ce Mémorandum de 52 pages, les Treize Parlementaires mettaient l’accent sur l’interventionnisme de l’État pour réguler l’environnement des marchés tandis que le moteur de l’économie étant assumé par les petites et moyennes entreprises (PME). Si, d’après leur vision concernant les secteurs stratégiques (mines, télécommunications, énergie), l’État congolais conservait un droit de regard voire même un monopole de fait, il n’en reste pas moins que dans le cadre de grands ajustements internationaux récemment intervenus, l’UDPS encourage ouvertement des partenariats entre secteur privé et secteur public, des joint-ventures entre capitaux nationaux et capitaux étrangers. Rompant totalement avec la tradition interventionniste de l’État créateur des conditions d’expansion et de développement économique, renvoyant ou réduisant celui-ci à de simples fonctions d’arbitrage et de définition du cadre macro-économique, ce parti dont l’idéologie est ‘‘la social-démocratie’’, conçoit nettement, aujourd’hui, la privatisation pour la gestion efficace de ces diverses ressources. Ce qui constitue, en réalité, une avancée historique.

La démocratie vantée dans la Lettre ouverte est aussi sociale. En effet, les rédacteurs et les signataires du Mémorandum de 52 pages placent inexorablement l’individu au cœur des préoccupations sociales. Pour eux, la notion de citoyenneté ne se limite pas spécifiquement à la sphère politique. Elle s’étend aussi à la société civile, notamment au sein des entreprises, où les Congolais bénéficient des droits économiques et sociaux dans le dessein de les protéger de tout arbitraire, entre autres des patrons de droit divin. À ce niveau, ces Représentants du peuple mettent l’emphase sur le principe d’équité et la justice distributive afin que ceux-ci vivent décemment comme toutes personnes humaines dignes.

Cette démocratie est enfin culturelle. En effet, la Lettre ouverte du 1er novembre encourage implicitement la constitution des groupes ou associations permettant aux Citoyens de défendre leurs intérêts sociaux ou corporatifs. Elle encourage les Congolais à se regrouper, à s’associer pour promouvoir leurs cultures dans le prolongement de l’unité nationale. Étant donné que le pays est un kaléidoscope de cultures, celle-ci fait réellement du Congolais un acteur culturel dont la mission est de sauvegarder tout son patrimoine culturel et traditionnel au même titre que l’État.

Comme le pouvoir mobutien fait la sourde oreille face à toutes ces injustices et bavures.

‘‘Et le malheur de notre pays également, c’est que Mobutu prendra en 1965 le pouvoir par la force. Depuis lors, il a, en réalité, chosifié l’homme politique congolais qui n’a pas eu ainsi l’occasion de s’exercer à la démocratie et d’avoir la culture politique. Ce phénomène continue. Loin de nous l’intention de nous vanter, il n’y a qu’à l’UDPS où, pour s’être lancé dans la lutte acharnée contre Mobutu, l’on peut se prévaloir de cette culture. Beaucoup d’autres membres de la classe politique congolaise, particulièrement les jeunes, sont restés très influencés par le mobutisme, de sorte que le problème de la culture politique reste fondamental’’ Étienne Tshisekedi, président national de l’UDPS, Entretien avec Le Potentiel, 3 mai 2002

Par Joël Lévy

La fameuse Lettre ouverte du 1er novembre 1980 adressée par les Parlementaires du Parti-État, le MPR, au dictateur Mobutu Sese Seko du Zaïre, connue sous l’appellation de ‘‘Mémorandum de 52 pages’’, est incontestablement le résultat d’un ras-le-bol exprimé par la Représentation nationale. Elle est surtout le résultat de l’exaspération d’un peuple impitoyablement écrasé par un régime politique peu soucieux de ses propres sujets et citoyens, dont les droits élémentaires sont continuellement bafoués par un pouvoir à la solde des intérêts économico-financiers étrangers. En d’autres termes, celle-ci est le refus catégorique de l’éternelle abdication devant l’injustice et la fatalité de l’histoire.

En effet, cette Lettre ouverte est essentiellement inspirée par des massacres commis par la soldatesque du régime mobutiste contre sa propre population dans la Province du Kasaï Oriental (Katekelayi) le 20 juillet 1979 [[16]]. Massacres odieux au cours desquels des contingents de soldats des Forces armées zaïroises (FAZ) exécutent sans sommation bon nombre de creuseurs de diamants privés d’emploi et en quête de revenus substantiels pour nourrir aisément leurs familles déshéritées et souvent pléthoriques. Devant ces exactions maintes fois répétées, les Parlementaires de cette région diamantifère (Anaclet Makanda Shambuyi Mpinga, Étienne Tshisekedi wa Mulumba, Milambwe, Tshibuyi, Joseph Ngalula Mpanda Njila) avertis de ces incidents malheureusement fâcheux saisissent, à travers une lettre du 23 juillet 1979, immédiatement le président de l’Assemblée nationale Joseph Iléo Songo Amba. Cette action est menée dans l’optique de trouver le plus rapidement possible une solution permettant de protéger la population livrée en pâture à la barbarie des hordes mobutistes. Totalement piqué au vif et déstabilisé par cette procédure, le régime dictatorial zaïrois crie, pour absoudre sa macabre responsabilité, à la conspiration des ‘‘Élus’’ de cette Province diamantifère avec qui il a toujours eu maille à partir [17].

Comme le pouvoir mobutien fait la sourde oreille face à toutes ces injustices et bavures, ces Représentants de la Nation décident de saisir dans une première étape diverses instances internationales, notamment les organismes de défense des droits humains [Amnesty International à Londres et Fédération internationale des droits de l’homme à Paris]. Ceci pour constituer une commission d’enquête internationale susceptible d’éclairer l’opinion publique sur lesdits massacres. Malgré la gravité de cette crise, Mobutu et ses sbires continuent à nier l’évidence, comme si rien ne s’était effectivement passé au Kasaï Oriental. Pour ce faire, ceux-ci complètement sur la défensive tentent, par tous les moyens, de verrouiller et même de bâillonner toute perspective d’enquête tant nationale qu’internationale en organisant une kyrielle de manifestations populaires en faveur du régime politique de Kinshasa. À leur tête, défilent plusieurs personnalités politiques et gouvernementales de premier plan. Parmi celles-ci, l’on dénombre, d’ailleurs, le Premier commissaire d’État André Bo-Boliko Lokanga, le gouverneur de la Ville de Kinshasa Amasco Augustin Kisombe Kiaku Muisi, alias ‘‘l’homme du 31 juin’’, et autres caciques ou pontifes du MPR tels que Antoine Mandungu Bula Nyati.

Mais, comme le cœur de cette même population mobilisée à des fins partisanes n’y est plus, le dictateur zaïrois et tous ses comparses qui ne sont plus, en réalité, en odeur de sainteté avec leurs compatriotes, prennent la décision de court-circuiter, de verrouiller et de bâillonner tous azimuts le Parlement national. À cet égard, ils instituent le fameux comité central du MPR en tant qu’organe d’État chargé d’adopter des lois en lieu et place de l’Assemblée nationale. Ainsi, refusant catégoriquement de voir les Représentants du peuple congolais totalement bâillonnés, réduits au rôle complice de ‘‘spectateur et d’applaudisseur’’, les députés Étienne Tshisekedi wa Mulumba, Anaclet Makanda Mpinga Shambuyi et Joseph Ngalula Mpanda Njila décident de contourner les structures rigides du parti unique. Ce faisant, ils portent finalement cette affaire odieuse, horrible, à l’arbitrage populaire au travers d’une Lettre ouverte destinée au dictateur zaïrois Mobutu le 1er novembre 1980. À cet effet, celle-ci est distribuée aussi bien aux représentations diplomatiques à Kinshasa dont l’Ambassade américaine qu’à toutes les couches de citoyens [18].

Suite à la trahison de leurs collègues députés Tshibuyi et Bashala Kantu a Milambu, Ngalula qui se prépare à rencontrer le Conseiller spécial du dictateur zaïrois Mobutu pour une demande de rendez-vous afin de lui remettre cette Lettre en mains propres, est appréhendé par les services de police politique dirigés par le tortionnaire Jean Seti Yale et conduit manu militari à la Cité de l’OUA (résidence-prison du Chef de l’État), le 30 décembre 1980. Le lendemain, c’est-à-dire le 31 décembre, les Représentants Étienne Tshisekedi wa Mulumba, Anaclet Makanda Mpinga Shambuyi, Paul-Gabriel Kapita Shabangi, Walter Isidore Kanana Tshiongo a Minanga et François Lusanga Ngiele se rendent directement à la résidence du dictateur Mobutu Sese Seko (Mont Ngaliema) pour se constituer à leur tour prisonnier en signe de solidarité à leur collègue mis injustement aux arrêts. Les autres Parlementaires (Gabriel Biringanine Mugaruga, Charles Dia Oken-a-Mbel, Célestin Kasala Kalamba ka Buadi, Protais Lumbu Maloba Ndoba, Symphorien Mbombo Lona, Edmond Ngoyi Mukendi Muya Mpandi) s’amènent également à tour de rôle à la Cité de l’OUA.

Ayant appris en tant que signataire de cette Lettre ouverte l’arrestation de ses collègues, le député Gabriel Kyungu wa ku Mwanza en vacances dans son fief katangais (Lubumbashi) exige, en guise de protestation et de solidarité, d’être lui également arrêté. Ce qui est fait deux jours plus tard. Acheminé à Kinshasa pour rejoindre ses pairs, il croise à sa descente d’avion le Haut cadre du Bureau politique et membre du comité central du MPR, de surcroît son collègue enseignant dans la Province du Katanga, Frédéric Kibassa Maliba. Vu l’accueil chaleureux réservé à son ami et surtout l’empressement ostensiblement témoigné à Kyungu wa ku Mwanza, Kibassa Maliba Masele tombe illico presto en disgrâce. Non-signataire du Mémorandum de 52 pages, il est rapidement déchu de son double mandat et interdit de sortir de la Ville de Kinshasa pendant toute l’année 1981.

Ainsi, commence de manière impromptue, inattendue pour certains et calculée pour d’autres, ‘’la saga de libération du Congo’’ de la plus féroce des dictatures en Afrique et dans le monde sur l’initiative des Treize Parlementaires. Déchus de leur mandat par la commission de discipline du comité central du MPR [19] pour avoir décrété consciemment pour certains voire inconsciemment pour d’autres la fin d’un système politique des plus macabres sur le continent, ils sont déférés devant deux juridictions : la Cour suprême de justice, la Cour de sûreté de l’État pour ‘‘acte séditieux et offense au Chef de l’État’’. Ils sont condamnés à de lourdes peines privatives de liberté puis relégués manu militari à l’intérieur du pays.

Si le 4 janvier 1959 constitue historiquement un tournant majeur dans la vie politique congolaise pour avoir été le signe annonciateur de l’indépendance nationale face à l’entreprise coloniale belge, le 1er novembre 1980 l’est tout autant. Cette dernière date demeure, par son symbole, une étape importante pour le pays surtout pour avoir exprimé de façon tranchante le désir ardent du peuple et de la Nation tout entière de rompre définitivement avec la dictature néocolonialiste du Maréchal Mobutu Sese Seko du Zaïre dont le porte-étendard est politiquement sur le terrain le Mouvement populaire de la révolution (MPR). En effet, ce jour-là normalement réservé à la commémoration des personnes décédées, trois Parlementaires du Parti-État ou parti unique, le MPR, décident de braver avec courage la forteresse dictatoriale mobutiste. Connus sous le nom de code ‘‘Tshimanga’’ (Étienne Tshisekedi wa Mulumba, Anaclet Makanda Mpinga Shambuyi et Joseph Ngalula Mpanda Njila), ces Représentants de la Nation excédés par la corruption, le népotisme, la mégestion et la kleptocratie, exaspérés par la barbarie néocolonialiste (les violations criantes des droits de la personne humaine) ainsi que la démagogie d’un pouvoir moribond, évanescent, écrivent directement au tyran zaïrois une Lettre ouverte communément appelée ‘‘Mémorandum de 52 pages’’.

Dans cette fameuse Lettre ouverte, d’ailleurs, cosignée par dix autres collègues Parlementaires du MPR (Gabriel Biringanine Mugaruga du Kivu, Charles Dia Oken-a-Mbel de Bandundu, François Lusanga Ngiele du Katanga, Paul-Gabriel Kapita Shabangi du Kasaï Occidental, Walter Isidore Kanana Tshiongo a Minanga du Kasaï Oriental, Célestin Kasala Kalamba ka Buadi du Kasaï Occidental, Oliveira da Silva Gabriel Kyungu wa ku Mwanza du Katanga, Protais Lumbu Maloba Ndoba du Katanga, Symphorien Mbombo Lona du Kasaï Occidental, Edmond Ngoyi Mukendi Muya Mpandi du Kasaï Occidental) [[20]], ces trois Députés originaires du Kasaï Oriental (Anaclet Makanda Mpinga Shambuyi, Étienne Tshisekedi wa Mulumba et Joseph Ngalula Mpanda Njila) demandent ouvertement au président-despote de Kinshasa de remanier de fond en comble son régime politique déjà aux abois. Ceux-ci lui demandent de réformer de façon substantielle son pouvoir qui n’est plus dans l’air du temps. Dans ce Mémorandum qui se veut, par définition, un diagnostic pointu du système accouché par Mobutu, ces Représentants du peuple congolais décryptent ce qu’est réellement ‘‘le Mal Congolais’’[21]. Loin de s’exercer à une critique subjective et personnelle, ils dissèquent en réalité, à la manière d’un médecin chevronné, méticuleux, le cancer généralisé dont pâtit depuis des lustres la collectivité nationale. Ils en énumèrent les symptômes et en détectent les manifestations pathologiques. Après la phase cruciale d’auscultation et d’analyse servant surtout à cerner la maladie, ces Députés proposent tous azimuts une chimiothérapie appropriée afin de relever le patient congolais terrassé par une grave crise politique datant, en fait, depuis l’accession du pays à l‘indépendance : ‘‘la question de légitimité du pouvoir d’État’’.

Exigeant la refonte des pans entiers de l’État, cette Lettre ouverte des Parlementaires du MPR adressée au despote-dirigeant zaïrois s’articule autour de dix points essentiels (l’organisation structurelle de l’État et le principe de séparation des pouvoirs; la mise en place des mécanismes de contrôle de l’appareil de l’État et l’institutionnalisation des organes de contrepoids démocratique; la place de l’État dans le concert des Nations souveraines et indépendantes, ses missions et tâches de souveraineté; la modernisation de la collectivité publique, la création des institutions politiques dignes et crédibles ainsi que la moralisation de la vie publique; la démocratie participative; la responsabilité des représentants du peuple et le mandat des élus de la Nation; la sécurité juridique des citoyens et les droits de la personne humaine; la définition d’une typologie de l’État liée aux exigences et aux impératifs de développement et de progrès; le développement économique et la justice sociale; le rôle du citoyen libre dans la société républicaine et son environnement, la mission des entreprises médiatiques dans l’action politique).

À la lumière des réflexions émises par ce groupe de Parlementaires du MPR-pour sortir définitivement cet État géant d’Afrique centrale de son immobilisme permanent, de sa léthargie coutumière et de la servitude politique, il s’avère que cette Lettre ouverte destinée au tyran zaïrois a une portée multiple. Par le ton utilisé pour interpeller l’autorité de l’État incarnée à cette époque critique par le Maréchal-dictateur Mobutu Sese Seko du Zaïre, ce Mémorandum se veut d’abord et avant tout un acte de libération nationale en vue d’ériger une société démocratique essentiellement fondée sur la primauté du droit et le principe de liberté, avec à la clé la réhabilitation d’un peuple souverain. C’est, ensuite, un acte de résistance face à un régime oppressif, dictatorial au visage colonial méconnaissant la notion angulaire d’État, de Nation et de Peuple. Enfin, le geste posé par ces Représentants constitue indubitablement un acte de conscientisation nationale sur le bien-fondé d’un environnement politique ouvert et tolérant, prospère et solidaire, axé principalement sur la justice et le développement. Toutefois, par leur action revendicatrice de la démocratie, ils contribuent à régénérer la Nation, à lui procurer un nouveau souffle de vie…

Un Acte de libération nationale

« Un changement politique d’envergure doit irrémédiablement intervenir dans le pays » Frédéric Kibassa Maliba, cofondateur de l’UDPS

Si les Congolais se sont libérés du joug colonial le 30 juin 1960, il n’en demeure pas moins vrai que la date du 1er novembre 1980 est le jour de libération nationale contre le régime dictatorial. C’est effectivement ce jour que tous les Congolais, quels qu’ils soient, où qu’ils soient, se sont vaillamment libérés non pas contre la seule dictature du Maréchal Mobutu Sese Seko du Zaïre mais contre toutes les dictatures, quelles que soient leurs forme ou méthode, quels que soient leurs discours politique voire même idéologie. En effet, le Mémorandum de 52 pages a résolument permis aux Treize Parlementaires signataires de libérer la Nation tout entière du système d’enfermement totalitaire mobutiste. En désignant officiellement, ouvertement, le dictateur Mobutu comme le premier responsable de la dégradation politique, économique, culturelle et sociale du pays, cette Lettre ouverte leur a permis de conférer à la Nation cette chère liberté de parole totalement confisquée par le mobutisme militaire depuis le coup d’État du 24 novembre 1965, et surtout bâillonnée sous le couvert du MPR transmué en parti unique en 1971 [22] et institutionnalisé Parti-État en 1974 [23].

L’on se rappelle que le macabre régime mobutien s’appuyant idéologiquement sur la fameuse doctrine de l’Authenticité élève le dictateur Mobutu Sese Seko du Zaïre au rang d’un véritable chef coutumier [[24]]. Ce qui, par conséquent, fait de l’État une chefferie traditionnelle. En l’espèce, il s’agit d’un chef coutumier dont la nature est celle d’un despote, d’un dictateur, ne tolérant, à dire vrai, aucune opposition ou concurrence. À cet égard, tout le monde se souvient pertinemment bien du fameux slogan lancé maintes fois par le tyran zaïrois pour justifier idéologiquement la monocratie qui sous-tend politiquement son pouvoir. À chaque fois que ce dirigeant criait haut et fort: ‘‘Tata bo’’ et ‘‘Mama bo’’, le peuple répondait naïvement ‘‘Moko’’. Ce qui signifie que dans une communauté, a fortiori dans un État ou dans une Nation, il n’y a qu’un seul père (Tata), une seule mère (Mama) [25]. En d’autres termes, au nom de cette théorie du pouvoir traditionnel, il ne peut exister dans un pays, à plus forte raison au Congo, qu’un seul chef, qu’un centre unique de décision ou d’impulsion. Étant, par essence, un lieutenant du pouvoir divin totalement guidé, protégé et conseillé par les ancêtres ou esprits veillant sur la communauté nationale, ce dirigeant roitelet a pour mission de conduire et d’éclairer politiquement la société (le peuple ou la collectivité). Par conséquent, nul à part lui, ne peut se prévaloir, en réalité, de ces facultés administratives, disposer de ces capacités de gestionnaire, donc se réclamer d’une quelconque chefferie, fût-elle oppositionnelle [26]

Fondé sur le paternalisme d’État [27], le mobutisme repose essentiellement sur le principe d’autocritique du président et non sur la critique du pouvoir. Ce système politique réputé dans son fonctionnement avilir réellement le peuple, chosifier les citoyens et prostituer l’indépendance de la Nation, est fondamentalement axé sur la règle stricte de soumission aveugle des élus au despote éclairé. Ce qui fait du MPR un parti des godillots et des lâches. C’est cette structure pyramidale pathologique du MPR inhibant naturellement à la base toute initiative et tout effort personnel, sapant irrémédiablement toute conscience nationale et toute intelligence que les Treize Parlementaires décident de rompre afin de faire entrer le Congo dans une ère de modernité politique où le chef de l’État est, d’abord et avant tout, un leader politique. Ce qui revient à dire un véritable visionnaire, un personnage ouvert d’esprit, entreprenant et tolérant, agissant matériellement sur la base d’un projet de société pour lequel il est assurément désigné par la majorité de ses concitoyens formant ce corps politique qu’est le peuple. En d’autres termes, il s’agit d’une personnalité sensiblement à l’écoute de ses pairs pour l’essor de la collectivité. Contrairement à la dictature néocolonialiste qui prend ses racines non à l’intérieur mais à l’extérieur du pays pour servir les intérêts des puissances étrangères au détriment de la Nation, c’est-à-dire la communauté publique.

Force est de constater que le kabilisme prétendument libérateur du peuple congolais – doctrine bâtarde sans fondement idéologique – lors de la prise militaire de Kinshasa par les rebelles de l’AFDL en date du 17 mai 1997 [[28]], fonctionne exactement comme le MPR mobutiste. Mimant dans ses moindres faits et gestes le dictateur Mobutu Sese Seko du Zaïre, le mercenaire autoproclamé président de la RDC, Mzee Mutwale Laurent-Désiré Kabila, soutenu par la fine fleur de la communauté internationale, reproduit dès la prise de pouvoir les mêmes tares que le mobutisme récusé par le peuple congolais lors de la tenue de la CNS : Suspension de la vie politique, bâillonnement des libertés publiques et droits fondamentaux, administration du pays par voie décrétale (la vicieuse pratique des ordonnances-lois), institution du parti unique aux allures du Parti-État, embrigadement de la population à travers les chembe-chembe, personnification du pouvoir politique, confiscation des médias, meurtres extrajudiciaires, vouyoucratie, privatisation de l’État, vaste prédation des ressources nationales, etc. Pis, sous ce régime rebelle à la démocratie dont la logique de gouvernement est le ‘‘hooliganisme d’État’’, le pays ne dispose matériellement d’aucune constitution ou texte fondamental. Celui-ci est totalement dirigé à partir d’un simple texte statutaire voire règlement intérieur d’un mouvement armé (AFDL). Il convient de mentionner que ce sont ces mêmes pratiques dictatoriales sans aucun doute héritées de son père adoptif que poursuit, sans se poser trop de questions voire sans trop réfléchir, le seigneur de guerre Joseph Hyppolite Kanambe Kazembere M’Twale Christopher dès le 26 janvier 2001. Il importe de souligner que toutes ces singeries kanambistes sont également vraies sous l’empire de la nouvelle constitution de Transition (promulguée le 6 avril 2003), de l’Accord global et inclusif (AGI) paraphé le 17 décembre 2002 et endossé le 2 avril 2003.

Ainsi, prévenant la dérive dictatoriale kabiliste, Dr Étienne Tshisekedi se souvenant de la Lettre ouverte du 1er novembre 1980 adressée au tyran zaïrois Mobutu Sese Seko du Zaïre demande solennellement à tous ses compatriotes de faire barrage aux usurpateurs du pouvoir d’État. Dans un appel pathétique lancé intra-muros, cet homme d’État demande à tous ses concitoyens de résister avec la dernière énergie à ce régime impénitent des mercenaires de l’AFDL sabordant les acquis démocratiques dont le garant est la CNS. Et, à ce titre, de se prévaloir immédiatement de l’article 37 [alinéa 2] de l’Acte fondamental portant dispositions constitutionnelles de la période de Transition du 4 août 1992. Ceci dans le but de permettre à la collectivité publique d’amorcer un retour aux institutions démocratiques, d’opérer sans condition un retour à la légalité républicaine.

C’est aussi pour cette raison que cette personnalité politique exige la signature de l’Accord global et inclusif lorsque les mercenaires du Mouvement de libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba Gombo et les rebelles de la faction belligérante de Kinshasa réunis au sein du PPRD [[29]] du général-major Joseph Hyppolite Kanambe Kazembere M’Twale Christopher signent un accord pirate et sectaire à Sun City (station balnéaire  sud-africaine) afin de se partager les rênes du pouvoir au détriment de la population et des intérêts sacro-saints du sanctuaire national. Car, estime-t-elle, tout régime politique imposé au peuple congolais doit être préalablement coopté sur la base de l’assentiment populaire. Néanmoins, dans le contexte exceptionnel des pourparlers politiques intercongolais (DIC), celui-ci doit inexorablement recevoir l’onction [l’application de la règle de consensus] des délégués du peuple (les Forces vives de la Nation, les acteurs de la société civile) et représentants de la Nation (partis politiques exprimant l’opinion du peuple). Ce qui permet ainsi d’en finir pour de bon avec cette ribambelle de régimes autoproclamés, cette litanie de pouvoirs politiques fonctionnant en dehors de toute légalité républicaine et de toute légitimité populaire.

Un Acte de résistance nationale

La plus grande particularité du Mémorandum de 52 pages demeure indubitablement la méthode de lutte instituée contre un pouvoir dictatorial au Congo pour transformer politiquement la société. C’est celle de la non-violence faisant appel aux qualités supérieures de l’Esprit, notamment à l’Intelligence humaine inspirée par la Conscience Suprême et Céleste. Pour résoudre les questions épineuses qui se posent crûment dans la communauté, celle-ci fait appel à la démarche conciliatoire impliquant trois phases essentielles dans le cadre du dialogue politique entre les Filles et les Fils d’une même Nation : la concertation, la conciliation et le compromis.

En effet, la concertation permet de renouer le fil du dialogue et d’intégrer les parties protagonistes dans le jeu politique. C’est la démonstration que les Congolais ne sont pas d’ennemis irréductibles. Ce sont d’abord et avant tout des enfants d’une même famille qui recherchent, par cette approche, la bonne entente ou la parfaite harmonie. Après la concertation qui permet de cerner le problème au cœur de la dispute nationale, il y a la conciliation. Cette étape cruciale permet principalement de rapprocher les vues en définissant et en situant de manière claire et nette les intérêts des uns et des autres. Celle-ci débouche finalement sur le compromis et non la compromission. Le compromis, en d’autres mots consensus, signifie ici harmonisation des intérêts de la collectivité publique en vue d’éviter toute rupture préjudiciable à la stabilité politique, dommageable à la sécurité des citoyens, tendant à sacrifier la paix et à hypothéquer la concorde nationale.

C’est cette démarche pacifiste qui est naturellement au cœur de la fameuse Lettre ouverte du 1er novembre 1980 et qui constitue le fondement de l’action politique de l’UDPS sous les régimes liberticides et maffieux mobutiste, kabiliste et kanambiste [[30]]. Face à l’entêtement du parti mobutiste à accaparer continuellement le pouvoir d’État, à ne pas respecter sa propre constitution d’État, cette logique est utilisée avec tact pour fonder l’UDPS le 15 février 1982[[31]]. Préalablement, il y a eu des négociations politiques entreprises entre les Treize Parlementaires et la partie dictatoriale conduite par le ‘‘Terminator’’ Honoré Ngbanda Nzambo ko Atumba [directeur des services mobutistes de renseignement [32] et Pr. Félix Vundwawe te Pemako (VTP) [directeur de cabinet du despote][[33]].

Cette même stratégie relayée par une forte pression populaire est également employée pour amener le dictateur Mobutu à décréter politiquement la fin du monolithisme idéologique, à accepter la tenue de la CNS en août 1991. Aussi est-elle employée pour conduire le chef mercenaire Mzee Mutwale Laurent-Désiré Kabila et les autres belligérants à signer l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka en 1999. Enfin, cette dernière est entreprise pour faire retourner à la table des négociations les putschistes de Sun City et tous leurs partenaires mendiants de la société civile ainsi que la plate-forme de l’ASD afin de conclure l’Accord global et inclusif (AGI), le 17 décembre 2002. Ce qui permet ainsi au pays de recouvrer son intégrité territoriale et d’adopter le 2 avril 2003 un acte constitutionnel permettant à la communauté nationale de se doter d’un cadre légal.

Un Acte de souveraineté

« L’avènement de Kabila et de Kanambe tient de la volonté extérieure tandis que l’UDPS tire toute sa force du peuple » Dr Étienne Tshisekedi, président national de l’UDPS

La Lettre ouverte du 1er novembre 1980 a véritablement pour effet de conférer à la Nation sa souveraineté bâillonnée par un régime fantoche. Elle a surtout pour effet de restituer au peuple sa qualité de souverain primaire confisquée par une oligarchie moribonde, compradore, vouée servilement aux intérêts étrangers, et ce au détriment de la population. Car, en posant le problème d’horribles massacres de Katekelayi sur le terrain démocratique (le respect de la loi d’État et la légitimité politique des dirigeants) et humanitaire (la question fondamentale des droits de la personne humaine), les rédacteurs et signataires du Mémorandum de 52 pages posent, en réalité, la question de la capacité des Congolais à maîtriser parfaitement, c’est-à-dire souverainement, leur espace territorial, par ricochet à disposer de toutes richesses matérielles qui s’y rattachent. Ceux-ci posent clairement le problème du droit de jouissance des ressortissants nationaux sur des immenses ressources qui leur appartiennent. D’autant plus que les richesses du Congo ne bénéficient, en pratique, nullement aux Citoyens.

En effet, depuis la colonisation belge, les richesses tant minérales que naturelles du Congo bénéficient aux intérêts étrangers. Le peuple qui est fréquemment employé pour les extraire, n’en tire aucun profit moral voire matériel. Celui-ci est totalement soumis au statut ingrat de captif, de maudit forçat dans un système d’exploitation vivement encouragé par ses propres autorités. Complices de la spoliation des ressources du pays, ces dernières pétries d’inconscience nationale contribuent à faire indubitablement de la collectivité publique un comptoir sans caissier malheureusement livré à la convoitise et à l’avidité des pirates. Ainsi, pour corriger toutes ces injustices visant au premier chef la population marginalisée et exclue, les Treize Parlementaires du MPR prônent clairement la démocratie effective, c’est-à-dire la participation directe des citoyens dans l’action politique dans le but de maîtriser leur destin collectif et le bonheur qui s’y rapporte.

Force est de constater que cette démocratie effective que la Lettre ouverte appelle de ses vœux est, en réalité, paralysée par la pseudo-libération nationale de Mzee Mutwale Laurent-Désiré Kabila qui confie, par le truchement d’une oligarchie composée essentiellement de flibustiers aguerris, la gestion et l’exploitation de toutes les ressources nationales à des consortiums étrangers sans l’aval du peuple souverain. Cette neutralisation des institutions démocratiques est également perpétuée par son fils adoptif Joseph Hyppolite Kanambe Kazembere M’Twale Christopher imposé au sommet de l’État par des puissances étrangères dans le dessein de couvrir leur saignée léopoldienne des richesses de l’État. Ce dernier n’a-t-il pas confisqué à son profit toutes les entreprises nationales dans le cadre de la période de Transition ? C’est effectivement au nom de ce pillage généralisé du Congo que ce jeune mercenaire tutsi rwandais, véritable ver dans le fruit de la Transition, est soutenu mordicus par la France et la Belgique [34].

En tant qu’acte de libération et de résistance, le Mémorandum de 52 pages se veut dans son cheminement un acte de persévérance du citoyen sur la voie de démocratisation politique et institutionnelle de la Nation. Dans la mesure où la liberté que cette dernière recherche avec frénésie, ne s’arrache pas. Celle-ci se conquiert au prix fort du sacrifice. Pour ce faire, en posant les prémisses de la lutte politique au Congo pour accéder à une société démocratique et républicaine fondée sur le primat du droit, cette Lettre ouverte contribue à conscientiser profondément le citoyen sur son rôle et sa place dans la collectivité publique.


[1] Mobutu Léopard veut dire guerrier intrépide, qui n’a peur de rien. C’est le roi de la forêt ou de la jungle. D’où l’empire de la dictature parce que le MPR-oublie que le léopard est, dans la forêt, un animal qui tue par simple plaisir.

[2] ‘‘Mobutu Dieu, Mobutu Jésus-Christ’’. Ici, le MPR met un accent particulier sur ses prétendues capacités de créateur et de sauveur de la société. Il incarne la paix et la stabilité politique. Il représente l’Amour miséricordieux. Pourtant, son régime provoque l’insécurité et est source d’instabilité.

[3] ‘‘Mobutu Soleil’’. Il est l’astre qui éclaire et inspire la société par son intelligence et sa bravoure.

[4]  Il s’agit d’une rupture formelle et non matérielle.

[5] Patrice Emery Lumumba véhicule, à ce niveau, la vision centralisatrice de l’État, met en relief le mythe uniformisateur de l’État (une entité supra-ethnique) dans une perspective de création ou de fondation du phénomène national. D’autant plus que le Mouvement national congolais (le MNC historique) est, par essence, dans ses racines une organisation unitariste.

[6] Ils ne contredisent point le père de l’indépendance à ce niveau. Ils partagent même toutes ses préoccupations en mettant l’emphase sur la notion angulaire de citoyen libre afin de contrecarrer l’ethnicisation et la régionalisation à outrance du régime mobutiste porté sur les privilèges réservés à quelques-uns au détriment de la multitude. En vertu de cette notion, ils estiment que l’on doit revenir au principe de méritocratie et d’équité (l’égalitarisme).

[7] Tout comme chez Patrice Emery Lumumba, la notion historique de drames communément vécus par les Congolais sous la dictature néocolonialiste mobutiste joue un rôle prépondérant dans cette définition de la citoyenneté impliquant l’appartenance à la Nation.

[8] Litho Moboti est l’oncle ‘‘autoproclamé’’ du Maréchal-dictateur Mobutu Sese Seko du Zaïre. Ce personnage on ne peut plus controversé symbolise et incarne, en réalité, l’oligarchie ethnico-familiale mobutiste dont la saine réputation est surtout d’avoir conduit le Congo à la faillite économique. Il présente cette particularité d’avoir épousé avec son prétendu neveu deux sœurs jumelles d’une même famille (Kossia et Bobi Ladawa). À son décès, Mobutu qui dispose d’un droit de cuissage sur toutes les femmes de la collectivité, prend en mariage, pour énième épouse, sa veuve Kossia.

[9] ‘‘Le régime de l’AFDL est un conglomérat d’aventuriers et d’opportunistes destinés à piller le pays’’ dixit Mzee Laurent-Désiré Kabila.

[10] Pour le colonisateur, le Congolais est un éternel enfant qui ne peut s’administrer que par le biais d’un tuteur. Pour le mobutisme triomphant, ce dernier est à l’âge de puberté. En tant que pubère, il faut l’éduquer avec un fouet (la discipline militaire). Pour le kabilisme et le kanambisme, le Congolais est un adolescent irresponsable, inconscient et insouciant qu’il faut dresser comme un chien avec le bâton.

[11] Le véritable objectif des magouilleurs et des soutiens du camp de la haine et de la trahison est la tenue d’une élection présidentielle au Congo sans la participation du leader de l’UDPS Étienne Tshisekedi. Pour ce faire, ceux-ci prévoient faire passer, avec la complicité du mercenaire Olivier Kamitatu Etsou du MLC [président de l’Assemblée nationale], au niveau des commissions parlementaires chargées d’étudier et d’amender la constitution, toute une série de critères dont, entre autres, la fourchette d’âge pour prétendre à la magistrature suprême (entre 35 et 65 ans), leur permettant de disqualifier automatiquement et systématiquement cet homme d’État et, par voie de conséquence, de favoriser leur poulain Joseph Hyppolite Kanambe Kazembere M’Twale Christopher. En repoussant toute perspective électorale dans les deux ans et demi, ils veulent que ce critère qualificatif d’âge corresponde exactement avec le trente-cinquième anniversaire du jeune mercenaire tutsi rwando-tanzanien actuellement âgé de 32 ans et bénéficiant logiquement de leur appui massif pour continuer à piller comme d’accoutumée le pays voire même le balkaniser (plan belgo-américain). Ainsi, il appartient au peuple congolais tout entier de se mobiliser comme un seul homme dans le dessein de faire totalement échec en amont tout comme en aval à cette manœuvre assassine. D’autant plus qu’il existe une similitude entre Kanambe et feu Mobutu. Ces deux rebelles à la démocratie portant le même prénom Joseph ont réalisé leur coup d’État à 30 ans d’âge avec la complicité de la Belgique. Cette puissance coloniale voudrait voir à tout prix son pupille et larbin Kanambe s’imposer également à 35 ans à la tête du Congo comme cela a été le cas avec Mobutu… pour une dictature féroce devant connaître une durée monarchique !

[12] Il importe de souligner l’absence effective de réaction politique et diplomatique du gouvernement d’union nationale de Transition à cette déclaration irresponsable du Belge Louis Michel, laquelle doit être résolument considérée comme une pure et simple immixtion aux affaires intérieures d’un État indépendant, a fortiori le Congo. D’où la connivence manifeste de ces deux sphères contre les intérêts légitimes du sanctuaire national.

[13] La fameuse réunion de Bruxelles où sont conviées la plupart des ténors de la fausse opposition politique, des chefs coutumiers ainsi que des mendiants de la société civile afin de court-circuiter le Dialogue inter congolais (DIC).  

[14] Le soutien politique et diplomatique aux putschistes du camp de la patrie à Sun City (les mercenaires [centrafricain] Jean-Pierre Bemba Gombo et [tutsi Rwando-tanzanien] Joseph Hyppolite Kanambe Kazembere M’Twale Christopher) lors de la conclusion de l’accord pirate et sectaire de l’Hôtel des Cascades afin de partager le pouvoir à Kinshasa au profit des intérêts belgo-français et de leurs partenaires occidentaux.  

[15] Pour n’avoir jamais pillé le pays et trempé dans les assassinats politiques, Étienne Tshisekedi est surnommé par ses pairs et concitoyens ‘‘Zéro Faute’’.

[16] Bien avant les massacres de Katekelayi, ce groupe de parlementaires interpellés par leur conscience de représentant national du peuple congolais au sein de l’Assemblée nationale s’étaient déjà offusqués, sous le régime unique du Parti-État mobutiste, le MPR, des massacres d’Idiofa (Bandundu) commis par les Forces armées zaïroises (FAZ) en 1978.

[17] La conspiration des Baluba : stratégie colonialiste de ‘‘diviser pour mieux régner’’ utilisée par le pouvoir aux abois pour discréditer la fronde parlementaire contre le régime dictatorial.

[18] Lire à cet effet ‘‘Histoire des vaillants Fils de la Saint-Sylvestre, Vade-Mecum du Combattant de l’UDPS’’, Léon-Tousseul Kalengayi Kadima-Muntuntu

[19] Décision du Comité central du MPR, Affaire Ngalula et consorts, Journal officiel de la République du Zaïre NO 3, 1er février 1981.

[20] À cette époque, feu Frédéric Kibassa Maliba Masele qui siège en qualité d’élu au Bureau politique du MPR, n’est pas signataire de la fameuse Lettre ouverte au dictateur Mobutu.

[21] Cette expression ’’Le Mal Zaïrois’’ a fini par être l’objet d’un ouvrage écrit par le journaliste-reporter français Euloge Boissonnade. Le Mal Zaïrois, Euloge Boissonnade, Hermé, Paris, 1990, 495 pages.

[22] L’objectif primordial du Maréchal-despote Mobutu Sese Seko du Zaïre était, sous le couvert de la doctrine politique de l’Authenticité, d’instituer, à l’instar du Maréchal-empereur Jean-Bedel Bokassa 1er en Centrafrique, une monarchie dans le sillage de la présidence à vie. Politiquement, le régime institutionnel de parti unique devrait lui servir de tremplin pour imposer à tous ses compatriotes écrasés par cette idée saugrenue. N’ayant pu réaliser ce rêve, il finit par s’introniser le grand chef des chefs coutumiers et traditionnels du pays au cours d’une cérémonie boycottée par la quasi-totalité des roitelets traditionnels. Le jour de son initiation télévisée, il prend le nom de’‘Mobutu Moyi’’ qui signifie ‘‘Mobutu Soleil ou Lumière’’. 

[23] C’est l’époque triomphante du grand théoricien et universitaire Honoré Mpinga Kasenda qui dirige l’Académie politique du Parti-État, l’institut Makanda Kabobi.

[24] Force est de constater que les chefs coutumiers usurpateurs du pouvoir traditionnel ont tous été investis par l’autorité belge pour servir ses intérêts dans le cadre de l’exploitation coloniale. En dotant son pouvoir politique d’une dimension idéologique s’appuyant sur le traditionalisme africain, Mobutu Sese Seko du Zaïre devient un allié sûr des Occidentaux qui rêvent et souhaitent un État fort (tyrannique) au Congo dans le cadre de la guerre froide.

[25] L’histoire ne dit jamais pourquoi le tyran zaïrois, s’il est vraiment conséquent avec lui-même, avec sa propre théorie du pouvoir fondé sur la présence unique du père et de la mère dans une famille ou communauté, légalise tout bonnement la polygamie (la polygynie) en lieu et place de la monogamie. Sans doute, voilà un des exemples concrets de contradiction mobutiste…

[26] La doctrine de l’Authenticité qui permet au Maréchal-dictateur Mobutu Sese Seko du Zaïre de confisquer indéfiniment le pouvoir, lui a permis de fabriquer l’homo mobutiens, c’est-à-dire un individu peu intelligent, indécis, distrait, dont la vie est réduite à la boisson, au sexe et à la musique selon la maxime chère à feu Jean de Dieu Nguz Karl I Bond, alors directeur du Bureau politique (organe suprême) du MPR: ‘‘un peuple heureux est un peuple qui chante et qui danse’’. À cause de sérieux traumatismes psychiques lui infligés par le régime despotique et terroriste de Kinshasa, ce dernier souffre des troubles émotionnels et affectifs graves. Il est mentalement amnésique. Il est moralement inconscient de sa personnalité et de ses possibilités humaines. Ces troubles se traduisent matériellement par une violence verbale voire même physique excessive…Force est de constater que cet ‘‘homo mobutiens’’ est spirituellement un itinérant. C’est un véritable sans-logis ou sans-abri spirituel vivant dans un univers sombre dominé par la répression psychique et mentale (la sorcellerie entraîne que ce dernier est foncièrement superstitieux et négatif). D’où sa peur de se mettre en valeur et son indécision à s’affirmer en affrontant le rythme lui imposé. Par conséquent, il préfère s’esquiver en s’abritant derrière un protecteur spirituel ou psychique (le prêtre, le pasteur ou le sorcier). Il importe d’admettre que cette fabrication mobutienne est dans tous les cas de figure un être intellectuellement et techniquement incompétent. Malgré cela, il adore exiger des postes hiérarchiques pour dominer des professionnels du métier. Pour faire passer ses idées même les plus farfelues, il utilise en toute circonstance l’arme de la violence verbale et physique car il est handicapé rationnellement. Doté d’un profil psychologique fragile, faible, il est incapable de distinguer le bien du mal. D’où son immoralité. Il n’a non plus aucun sens du bien public ou commun. Ce dernier agit toujours avant de réfléchir. Lorsque ses actes moralement répréhensibles provoquent des dégâts irréparables dans la communauté, son émotivité primaire prend soudainement le relais juste pour exprimer ses regrets au lieu de penser à réparer les dommages et contribuer au bon fonctionnement de la collectivité ou de son environnement immédiat. Hautain, arrogant et imbu de sa piètre personne (la culture incivique de la médiocrité), celui-ci est constamment en mal de succès et de popularité. Il adore attirer, détourner tous les regards (les projecteurs) vers lui, même pour ses bêtises ou anti-valeurs.

[27] Le dictateur est un patriarche à la tête d’une communauté nationale sur laquelle il dispose d’un droit de vie ou de mort.

[28] Le 17 mai 1997 n’est pas le jour de la libération nationale, comme le prétendent les mercenaires kabilistes des CPP. C’est, en vérité, le jour de la perdition nationale, du bâillonnement populaire et du naufrage démocratique. Force est de constater que les autorités politiques belges sont, par la voie du Ministre des Affaires étrangères Éric Derycke (cabinet Jean-Luc Dehaene), le tout premier gouvernement dans le monde à reconnaître officiellement le régime fantoche de l’AFDL dirigé par le chef-mercenaire Mzee Laurent-Désiré Kabila sabordant la démocratie congolaise dont le garant est la CNS. En ce moment, ce seigneur de guerre soutenu par les sociétés financières et minières judéo-anglo-saxonnes a pour principal conseiller militaire le colonel belge Willy Mallants, un ex- cadre de la Force publique (Armée coloniale belge au Congo).

[29] Parti du peuple pour la reconstruction et le développement.

[30] C’est l’utilisation des voies et moyens démocratiques pour interpeller une autorité et combattre son régime politique.

[31] Ils invoquent à titre justificatif les dispositions de l’article 4 de la constitution de 1967 dont Dr Étienne Tshisekedi est le principal initiateur et rédacteur, lesquelles reconnaissent le multipartisme [le bipartisme] au Congo-Kinshasa.

[32] Conseiller du dictateur Mobutu dans le domaine de sécurité nationale.

[33] À cette époque, il exerce les fonctions de membre du Comité central du MPR et de Vice-Premier commissaire d’État chargé de l’Administration du territoire au sein du gouvernement ordonnateur de la relégation des Treize Parlementaires dans leur région d’origine.

[34] Lors de la décolonisation du pays le 30 juin 1960, c’est un gouvernement comprenant des ministres libéraux (dont le non moins machiavélique de Schrijver) à Bruxelles qui a totalement piégé voire saboter l’indépendance nationale du tout jeune Congo. Par conséquent, est-il vraiment étonnant, même surprenant de constater, comme si l’histoire se répétait, que c’est encore un ministre libéral, le crypto colonialiste ‘‘Louis Michel’’ qui participe au démantèlement de la démocratie [qui signifie, en réalité, l’achèvement du processus d’indépendance du pays] dans cet État d’Afrique centrale afin d’y imposer un régime fantoche et prédateur comme celui du tristement célèbre Maréchal Mobutu ?

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