Plan par le Peuple de Lutte contre la Corruption en République Démocratique du Congo en 8 axes

Introduction

La corruption constitue l’un des freins majeurs au développement de la République Démocratique du Congo. Elle affecte de manière systémique toutes les sphères de la vie publique et prive les citoyens de leurs droits fondamentaux. Dans les administrations, les entreprises publiques, les services de santé, l’éducation, la justice ou encore les forces de sécurité, elle se manifeste par des pratiques déviantes telles que le clientélisme, les pots-de-vin, les surfacturations, la captation de fonds publics ou encore le favoritisme. Ces actes ne sont pas des anomalies ponctuelles : ils relèvent d’un système enraciné depuis plusieurs décennies.

L’ampleur du phénomène est telle qu’elle compromet les efforts de développement, freine les investissements étrangers, et entretient un climat de méfiance entre les citoyens et leurs institutions. Elle empêche une distribution équitable des ressources et alimente les inégalités sociales. La jeunesse, pourtant porteuse d’espoir et d’innovation, se trouve désillusionnée face à un système où la médiocrité est souvent récompensée au détriment du mérite.

Consciente de cette réalité, l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), fidèle à son héritage de lutte pour la justice sociale et l’état de droit, fait de la lutte contre la corruption un axe central de son action politique. En tant que parti au pouvoir, l’UDPS se doit de proposer une stratégie nationale claire, cohérente et opérationnelle pour mettre fin à l’impunité, restaurer la confiance des citoyens et construire un État républicain fort.

Le présent Plan National de Lutte contre la Corruption (PNLC) est le fruit d’une réflexion approfondie intégrant les enseignements tirés d’expériences nationales et internationales, les recommandations des institutions spécialisées, ainsi que les attentes exprimées par la population lors de différents forums citoyens. Il propose une démarche à la fois éthique, structurelle et participative.

Ce plan s’inscrit dans une vision d’ensemble de transformation éthique, de modernisation administrative, et de responsabilisation citoyenne. Il vise à renforcer la transparence, assainir la gestion publique, numériser les procédures administratives, promouvoir une justice indépendante, et mobiliser les citoyens comme vigies de l’intégrité. L’objectif est de créer un véritable sursaut national autour des valeurs de justice, de mérite et de service public.

Articulé en huit axes prioritaires, adaptés aux réalités congolaises, ce plan est une feuille de route pour une RDC libérée des fléaux de la corruption et résolument engagée sur la voie de la bonne gouvernance.

Axe 1 : Cartographie des secteurs à risque élevé

Afin de structurer efficacement la lutte contre la corruption, il est indispensable d’identifier les secteurs les plus vulnérables aux pratiques corruptives. Cette cartographie stratégique permet de concentrer les efforts, de prioriser les réformes et de cibler les ressources de contrôle et de répression. En République Démocratique du Congo, plusieurs domaines clés présentent un risque élevé de corruption, tant par leur importance économique que par l’opacité qui y règne :

  1. Douanes :
    • Les postes frontaliers terrestres, aériens et maritimes sont parmi les plus exposés aux pratiques de corruption. Le manque de transparence dans la fixation des droits et taxes, les dédouanements parallèles, les fraudes à la valeur et à la quantité sont monnaie courante. Les pertes pour le Trésor public sont considérables.
  2. Marchés publics :
    • L’attribution des contrats publics souffre d’un manque de transparence, de conflits d’intérêts et de favoritisme. Des entreprises fictives ou liées à des responsables politiques remportent régulièrement des appels d’offre sans véritable concurrence, souvent avec des surfacturations massives.
  3. Police nationale :
    • De nombreuses unités sont accusées d’extorsions, de perception illégale d’amendes ou de pratiques abusives lors des contrôles routiers ou d’arrestations. L’absence de mécanismes internes d’enquête et de sanctions favorise un sentiment d’impunité.
  4. Justice :
    • La lenteur des procédures, les jugements à géométrie variable, la corruption de certains magistrats et greffiers minent la crédibilité du système judiciaire. De nombreux citoyens perçoivent la justice comme un privilège réservé aux riches.
  5. Secteur minier :
    • Ce secteur stratégique est gangréné par des pratiques illicites : non-respect des cahiers de charge, exploitation artisanale illégale, transferts opaques de titres miniers, corruption dans l’octroi des permis. L’État perd d’importantes ressources.
  6. Santé :
    • Dans les hôpitaux publics, les patients sont souvent contraints de payer des « frais informels » pour recevoir des soins de base. Le détournement des médicaments subventionnés et les fraudes dans les marchés pharmaceutiques aggravent la situation.
  7. Éducation :
    • Le paiement illégal de « frais de motivation », les ventes de bulletins scolaires, les examens monnayés ou les nominations frauduleuses dans l’enseignement constituent autant de formes de corruption tolérées dans ce secteur fondamental.

Cette cartographie sectorielle ne vise pas à stigmatiser, mais à fournir une base objective pour orienter les politiques de prévention, d’audit et de sanctions. Elle servira de socle à la priorisation des actions dans le Plan National de Lutte contre la Corruption.

Axe 2 : Renforcement du cadre légal et institutionnel

L’efficacité d’une politique de lutte contre la corruption repose en grande partie sur la robustesse du cadre juridique et institutionnel. En République Démocratique du Congo, bien que des textes législatifs existent, leur application demeure souvent partielle, inégale ou contournée. Les institutions en charge de cette mission manquent fréquemment d’indépendance, de coordination et de ressources humaines et financières suffisantes.

Révision et harmonisation de la législation

Il est urgent de réviser la loi n°04/023 du 12 novembre 2004 relative à la lutte contre la corruption, en la mettant en conformité avec les standards internationaux, en particulier avec les dispositions de la Convention des Nations Unies contre la corruption (CNUCC).

La nouvelle législation devra également intégrer les formes émergentes de corruption, notamment :

  • La corruption dans le numérique et les marchés électroniques,
  • Les conflits d’intérêts dans la fonction publique et les entreprises publiques,
  • L’enrichissement illicite et l’abus de fonction,
  • Le trafic d’influence et la dissimulation de patrimoine.

Mise en place d’une Autorité Nationale Anti-Corruption (ANAC)

La création d’une ANAC indépendante est un impératif stratégique. Cette autorité devra :

  • Bénéficier d’une autonomie administrative et budgétaire,
  • Disposer d’un mandat clair couvrant la prévention, l’enquête, l’éducation et la poursuite des actes de corruption,
  • Être composée de membres reconnus pour leur intégrité, issus de la magistrature, de la société civile, du secteur privé et du Parlement,
  • Avoir un pouvoir de saisine directe des juridictions compétentes.

Renforcement des institutions existantes

Le dispositif institutionnel doit s’appuyer sur des structures renforcées et mieux coordonnées :

  • Accroître les moyens logistiques et humains de la CENAREF, de l’IGF, de la Cour des comptes et de la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption,
  • Instituer une plateforme de coordination entre ces organes,
  • Garantir l’indépendance fonctionnelle et financière des magistrats spécialisés en infractions économiques.

Protection des lanceurs d’alerte et des témoins

La dénonciation des actes de corruption doit être sécurisée par :

  • L’adoption d’un cadre légal protégeant les lanceurs d’alerte contre les représailles, les sanctions professionnelles ou les poursuites abusives,
  • La création d’un mécanisme confidentiel de signalement,
  • La mise en place d’un accompagnement juridique et psychologique pour les témoins.

Renforcement du régime des sanctions

Pour dissuader efficacement les comportements déviants :

  • Les peines applicables aux actes de corruption devront être aggravées, notamment en cas de récidive ou d’implication de hauts responsables,
  • Les sanctions administratives doivent inclure la radiation, la suspension ou l’inéligibilité temporaire,
  • Les biens mal acquis feront l’objet de saisies systématiques et devront être réaffectés à des programmes d’intérêt général (santé, éducation, infrastructures).

Ce renforcement du cadre légal et institutionnel représente une étape fondamentale vers une gouvernance éthique et efficace. Il envoie un signal fort d’engagement à la population et aux partenaires internationaux, tout en établissant les fondements juridiques nécessaires pour mener une lutte rigoureuse, impartiale et durable contre la corruption.

Axe 3 : Digitalisation des services publics

La transformation numérique de l’administration publique constitue aujourd’hui un pilier incontournable de la lutte contre la corruption. En République Démocratique du Congo, où les pratiques opaques et les circuits informels persistent, la digitalisation offre une opportunité historique de refonder la relation entre l’État et ses citoyens sur la base de la transparence, de l’efficacité et de la responsabilité.

En remplaçant les processus manuels par des systèmes automatisés, en supprimant les intermédiaires, et en garantissant un accès libre et sécurisé aux données publiques, l’État se dote d’un arsenal technique puissant pour prévenir les abus, renforcer la traçabilité et limiter les zones grises propices aux détournements.

Objectifs stratégiques de la digitalisation

  • Réduction drastique des interactions humaines dans les procédures critiques (paiements fiscaux, délivrance de documents, adjudication des marchés publics),
  • Renforcement de la traçabilité et de l’auditabilité des opérations administratives et financières,
  • Ouverture des données publiques via des plateformes numériques accessibles à tous (budgets, marchés, dépenses, bilans),
  • Amélioration mesurable de la qualité, de la rapidité et de l’équité des services rendus aux citoyens et aux opérateurs économiques.

Leviers opérationnels de mise en œuvre

  1. Systèmes intégrés de gestion financière (SIGFP) :
    • Uniformiser et étendre l’usage des SIGFP dans toutes les entités administratives,
    • Interconnecter les systèmes de gestion budgétaire, fiscale, douanière et bancaire pour une vision consolidée des flux financiers.
  2. Portails nationaux de transparence :
    • Développer un guichet unique d’information publique sur les dépenses, subventions, contrats publics et audits réalisés,
    • Rendre contraignante la publication en ligne de tous les appels d’offres, marchés attribués et rapports d’exécution.
  3. Dématérialisation des services administratifs :
    • Numériser l’ensemble des démarches administratives (état civil, cadastre, permis, licences, certificats),
    • Intégrer des systèmes de suivi en temps réel des dossiers avec notifications numériques aux usagers.
  4. Dispositifs numériques de dénonciation citoyenne :
    • Déployer des plateformes digitales sécurisées de signalement anonyme des actes de corruption,
    • Connecter ces plateformes à un centre national de traitement et de feedback, garantissant réactivité et confidentialité.
  5. Renforcement des capacités numériques du personnel public :
    • Instaurer des modules obligatoires de formation à la gouvernance numérique et à la cybersécurité,
    • Mettre en place des cellules techniques régionales d’assistance à la digitalisation dans chaque province.

Impacts attendus à court et moyen terme

La digitalisation permet d’instaurer une culture de redevabilité publique, de freiner les pratiques informelles, et d’améliorer la confiance des citoyens dans l’État. Elle constitue un socle technologique et éthique pour une gouvernance moderne, inclusive et résistante à la corruption. Dans le contexte congolais, son adoption généralisée représente un véritable tournant vers une administration transparente, performante et tournée vers l’intérêt général.

Axe 4 : Contrôle, audit et répression renforcés

Une stratégie de lutte contre la corruption ne saurait produire d’effets concrets sans un dispositif robuste de contrôle, d’audit indépendant et de répression effective. En République Démocratique du Congo, le renforcement des mécanismes de vérification interne et externe, l’indépendance des organes de contrôle et l’efficacité des poursuites judiciaires sont des conditions essentielles pour dissuader les comportements illicites et mettre fin à l’impunité.

Renforcement des institutions de contrôle et d’audit

  • Inspection Générale des Finances (IGF) : renforcer ses moyens humains, logistiques et technologiques pour lui permettre d’effectuer des missions de contrôle inopinées sur l’ensemble du territoire.
  • Cour des comptes : garantir son autonomie financière, améliorer sa capacité d’audit des institutions publiques, des entreprises de l’État et des entités territoriales décentralisées.
  • Cellules d’audit interne dans les ministères et entreprises publiques : professionnaliser et rendre obligatoires les audits réguliers, avec publication des rapports.

Coordination interinstitutionnelle

  • Mise en place d’un Conseil National de Contrôle et d’Audit chargé de coordonner les activités de l’IGF, de la Cour des comptes, de la CENAREF et des inspections ministérielles.
  • Système centralisé de suivi des recommandations d’audit, assurant la traçabilité de leur mise en œuvre et permettant des sanctions en cas de non-exécution.

Renforcement du dispositif judiciaire et répressif

  • Création de juridictions spécialisées dans les infractions économiques et financières, dotées de magistrats formés, indépendants et protégés.
  • Parquets financiers autonomes, habilités à enquêter sur les personnalités publiques et les entreprises impliquées dans des actes de corruption.
  • Procédures accélérées et transparentes pour les affaires de détournement, avec diffusion publique des décisions judiciaires.

Coopération nationale et internationale

  • Renforcement de la coopération entre les services congolais de lutte contre la corruption, notamment la police judiciaire, la CENAREF, l’ANR et les juridictions spécialisées.
  • Collaboration active avec les partenaires internationaux (INTERPOL, ONUDC, Groupe Egmont) pour le traçage des flux financiers illicites, le gel des avoirs et l’extradition des fugitifs.

Mesures de protection et de sécurité

  • Protection des enquêteurs, magistrats et auditeurs impliqués dans les affaires sensibles,
  • Mise en place d’un fonds spécial de soutien aux opérations à haut risque, garantissant les moyens logistiques et la couverture juridique des équipes.

L’efficacité de la lutte contre la corruption dépend de la crédibilité des contrôles, de la rigueur des audits et de la certitude de sanctions. En renforçant l’ensemble du système de contrôle et de répression, la RDC envoie un message clair : la corruption n’est plus tolérée, et les actes délictueux seront systématiquement identifiés, poursuivis et sanctionnés.

Axe 5 : Sensibilisation et mobilisation citoyenne

La lutte contre la corruption ne peut être l’apanage des seules institutions publiques. Elle nécessite l’implication active et continue de l’ensemble de la société. En République Démocratique du Congo, il est crucial de sensibiliser la population aux conséquences de la corruption et de renforcer les capacités des citoyens à agir en tant que vigies de l’intégrité publique. Une société informée, engagée et organisée constitue un contre-pouvoir indispensable face aux dérives de la gouvernance.

Objectifs de cet axe

  • Développer une conscience citoyenne collective face aux méfaits de la corruption,
  • Encourager les comportements éthiques dans les administrations, les entreprises et les communautés,
  • Favoriser la participation active des citoyens au suivi de l’action publique,
  • Valoriser les initiatives locales de transparence et d’intégrité.

Actions prioritaires à mettre en œuvre

  1. Campagnes nationales de sensibilisation :
    • Lancer des campagnes médiatiques massives (radio, télévision, presse écrite, réseaux sociaux) pour éduquer le public sur les formes de corruption et leurs impacts,
    • Utiliser des langues locales et des canaux de communication communautaires pour une diffusion inclusive.
  2. Éducation civique et morale :
    • Intégrer des modules sur l’éthique, la responsabilité et l’intégrité dans les programmes scolaires à tous les niveaux,
    • Organiser des concours et forums scolaires sur la citoyenneté et la lutte contre la corruption.
  3. Implication des leaders communautaires et religieux :
    • Former les chefs coutumiers, religieux et animateurs de la société civile pour relayer des messages d’intégrité auprès des populations,
    • Encourager les sermons, prêches et conférences sur les valeurs de transparence et de justice.
  4. Soutien aux organisations de la société civile :
    • Mettre en place un fonds d’appui aux initiatives citoyennes de contrôle budgétaire, d’observation électorale ou de veille communautaire,
    • Favoriser les partenariats entre OSC et médias pour la production de contenus d’enquête et de sensibilisation.
  5. Création de plateformes de participation citoyenne :
    • Développer des mécanismes de consultation publique, de budget participatif et de reddition de comptes locale,
    • Mettre en ligne des outils de feedback citoyen sur la qualité des services publics.

La sensibilisation et la mobilisation citoyenne permettent de transformer la lutte contre la corruption en une responsabilité partagée. En donnant aux citoyens les moyens de comprendre, de surveiller et d’intervenir, l’État établit les bases d’un contrat social renouvelé fondé sur la confiance, la transparence et l’implication collective.

Axe 6 : Transparence dans la gestion des ressources naturelles

La République Démocratique du Congo possède un potentiel immense en ressources naturelles — minerais, forêts, terres arables, eaux — qui devrait constituer un moteur de développement économique et social. Cependant, l’opacité dans la gestion de ces ressources, les contrats opaques, les détournements de revenus et les conflits d’intérêts ont trop souvent empêché le pays de tirer parti de cette richesse. La transparence dans la gouvernance des ressources naturelles devient ainsi un impératif stratégique.

Enjeux de gouvernance extractive en RDC

  • Rétablir la confiance des citoyens et des investisseurs dans la gestion du secteur extractif,
  • Réduire les pertes fiscales dues aux pratiques frauduleuses dans l’exploitation minière et forestière,
  • Promouvoir une répartition équitable des revenus générés par les ressources naturelles,
  • Prévenir les conflits communautaires liés à l’exploitation illégale ou injuste des ressources.

Mesures à mettre en œuvre

  1. Adhésion et application rigoureuse de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) :
    • Publier régulièrement les rapports ITIE avec les flux financiers détaillés entre entreprises extractives et institutions publiques,
    • Intégrer les résultats de l’ITIE dans les politiques publiques et les débats parlementaires.
  2. Audit et publication des contrats miniers et forestiers :
    • Rendre accessibles au public tous les contrats d’exploitation signés entre l’État et les entreprises,
    • Introduire une clause de transparence contractuelle obligatoire dans tout nouveau contrat.
  3. Renforcement des capacités de contrôle des régies financières et des services miniers :
    • Former les inspecteurs des mines, des hydrocarbures, de l’environnement et des forêts à la détection de fraudes,
    • Mettre en place des outils numériques de suivi des redevances, des exportations et de la conformité environnementale.
  4. Implication des communautés locales dans la gouvernance des ressources :
    • Exiger des entreprises minières et forestières des plans de développement communautaire élaborés de manière participative,
    • Mettre en place des comités de veille communautaire sur les engagements sociaux des entreprises.
  5. Traçabilité des revenus et affectation transparente des fonds publics issus des ressources naturelles :
    • Créer un fonds souverain de développement alimenté par les recettes extractives, géré de manière indépendante,
    • Publier régulièrement les affectations budgétaires de ces fonds par secteur et par territoire.

La transparence dans la gestion des ressources naturelles est un levier essentiel pour transformer la richesse potentielle du pays en développement réel et durable. Elle permet de rompre avec les logiques prédatrices du passé et d’inscrire l’exploitation des ressources dans une logique de bénéfice partagé, d’équité intergénérationnelle et de souveraineté nationale.

Axe 7 : Suivi, évaluation et indicateurs de performance

Une politique nationale de lutte contre la corruption ne peut produire des résultats concrets que si elle s’accompagne d’un système rigoureux de suivi et d’évaluation. En République Démocratique du Congo, le manque de données fiables, l’absence de mécanismes d’évaluation indépendants et la faible reddition de comptes ont longtemps empêché de mesurer l’impact réel des réformes anticorruption. Il est donc impératif de bâtir un dispositif robuste d’évaluation basé sur des indicateurs clairs, mesurables et vérifiables.

Objectifs de ce dispositif

  • Assurer la transparence dans l’exécution des engagements pris dans le cadre du plan national,
  • Renforcer l’obligation de rendre compte à tous les niveaux de l’administration,
  • Permettre des ajustements stratégiques fondés sur des données factuelles,
  • Valoriser les bonnes pratiques et identifier les zones de faiblesse.

Actions clés à mettre en œuvre

  1. Mise en place d’un Tableau de Bord National Anticorruption :
    • Regrouper l’ensemble des indicateurs de performance liés à la prévention, à la détection, aux poursuites et à la sanction des actes de corruption,
    • Publier trimestriellement des rapports d’avancement accessibles au public.
  2. Développement d’indicateurs spécifiques et sectoriels :
    • Définir des indicateurs pour chaque secteur à risque (douanes, marchés publics, justice, santé, etc.),
    • Inclure des indicateurs de perception (enquêtes auprès des citoyens, usagers et entreprises) et des indicateurs de résultats (montants recouvrés, poursuites engagées, condamnations prononcées).
  3. Évaluation indépendante et participative :
    • Confier l’évaluation périodique du plan à une structure indépendante incluant des représentants de la société civile, du monde académique, du secteur privé et des partenaires techniques et financiers,
    • Organiser des revues annuelles ouvertes au public et diffusées dans les médias.
  4. Renforcement des capacités statistiques des institutions publiques :
    • Outiller les ministères et institutions de contrôle pour produire des données fiables et désagrégées,
    • Mettre en réseau les bases de données existantes pour un meilleur partage d’informations.
  5. Création d’un Mécanisme d’Alerte Précoce (MAP) :
    • Détecter les signaux faibles de corruption systémique (explosion des coûts, retards non justifiés, refus de contrôle),
    • Déclencher des missions d’inspection ou d’audit ciblées dès l’apparition d’anomalies significatives.

La mise en place d’un système de suivi et d’évaluation performant permettra de sortir du pilotage à vue et d’instaurer une culture de la mesure et de l’impact. Il s’agit de rendre visible et tangible la progression de la lutte contre la corruption, d’encourager la performance publique et de rétablir la confiance des citoyens dans l’action de l’État.

Axe 8 : Financement et partenariats

La mise en œuvre efficace d’un Plan National de Lutte contre la Corruption nécessite un engagement financier soutenu ainsi qu’une mobilisation coordonnée des partenaires nationaux et internationaux. Sans ressources adéquates, même les meilleures réformes restent lettre morte. L’État congolais doit ainsi garantir un financement pérenne, transparent et orienté vers les résultats, tout en valorisant les synergies avec les bailleurs de fonds, la société civile et le secteur privé.

Objectifs de cet axe

  • Assurer un financement stable et traçable des actions de lutte contre la corruption,
  • Mettre en place des mécanismes de partenariat public-privé pour l’intégrité,
  • Mobiliser l’expertise et les ressources des partenaires techniques et financiers,
  • Éviter la dépendance excessive à l’aide extérieure en développant des ressources internes durables.

Principales mesures à adopter

  1. Création d’un Fonds National pour l’Intégrité Publique (FNIP) :
    • Doter ce fonds de ressources issues du budget national, des amendes, des biens confisqués et des appuis extérieurs,
    • Assurer sa gestion transparente et indépendante avec un comité de suivi multipartite (État, société civile, partenaires).
  2. Budgétisation sensible à l’intégrité dans les ministères et institutions :
    • Intégrer une ligne budgétaire « transparence et lutte contre la corruption » dans chaque ministère,
    • Rendre obligatoire l’affectation de ressources à la formation, à la numérisation des services, et à l’audit interne.
  3. Partenariats stratégiques avec les bailleurs de fonds :
    • Élaborer une stratégie de mobilisation de l’aide alignée sur les priorités nationales,
    • Mettre en place des mécanismes conjoints de pilotage, de suivi et de redevabilité des financements.
  4. Engagement du secteur privé dans la lutte contre la corruption :
    • Mettre en place une charte nationale d’éthique des entreprises,
    • Encourager les entreprises à adopter des mécanismes de conformité (compliance), à publier leurs engagements et à collaborer avec les institutions de contrôle.
  5. Renforcement des capacités de gestion financière publique :
    • Former les gestionnaires publics à la planification, à la gestion axée sur les résultats et à la transparence budgétaire,
    • Instaurer des audits systématiques des fonds alloués à la lutte anticorruption.

En finançant sérieusement les efforts anticorruption et en tissant des partenariats solides, la RDC pourra garantir la durabilité des réformes entreprises, renforcer la confiance des citoyens et des investisseurs, et inscrire la gouvernance intègre comme socle de sa relance économique et démocratique.

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